Revue de littérature #12

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Charte pour un journalisme à la hauteur de l'urgence climatique

Des dizaines de journalistes, dont ceux de Vert le média, ont joint leurs forces pour écrire ensemble la première "Charte pour un journalisme à la hauteur de l’urgence écologique", un texte indispensable pour les médias, la démocratie et le climat, qui est sorti le 14 septembre 2022.
En 2022 encore, les rapports du Giec passent à la trappe ; des journaux célèbrent la canicule “heureuse” et des climatosceptiques sont invités sur les plateaux télés.
Résultat : les citoyens sont perdus et ne savent pas démêler le vrai du faux sur un sujet vital pour leur avenir. C'est pour y remédier qu'une trentaine de journalistes de plusieurs médias ont rédigé ce texte important à l'usage de leurs confrères et consoeurs.

En 13 points, cette charte se veut une boussole pour améliorer collectivement le traitement de ces sujets. On y rappelle, par exemple que le vivant, le climat et la justice sociale sont liés ; le besoin de toujours plus de pédagogie ; la nécessité de choisir les mots et les images les plus justes, de choisir les bons experts. 

« C’est un suicide collectif » : le chef de l’ONU dénonce l’indifférence du monde face au changement climatique

« Je n’ai jamais vu de carnage climatique de cette ampleur », a déclaré Antonio Guterres lors d’une visite au Pakistan, pays dévasté par des inondations monstres.

« Depuis Islamabad, je lance un appel mondial : arrêtez cette folie. Investissez dès maintenant dans les énergies renouvelables. Mettez fin à la guerre contre la nature. »

Près de 1 400 personnes ont péri depuis juin dans ces inondations. Ayant redoublé d’intensité à cause du réchauffement climatique, celles-ci sont causées par des pluies de mousson torrentielles et ont recouvert un tiers du Pakistan - une zone de la taille du Royaume-Uni -, détruisant habitations, commerces, routes, ponts et récoltes agricoles.

Le secrétaire général des Nations Unies espère que sa visite encouragera la communauté internationale à soutenir financièrement le pays, qui estime avoir besoin d’au moins 10 milliards de dollars pour réparer et reconstruire les infrastructures endommagées ou détruites. Une somme impossible à rassembler seul pour le Pakistan, à cause de son fort endettement.

Antonio Guterres s’était déjà indigné de l’indifférence du monde, en particulier des pays les plus industrialisés, face au changement climatique. « C’est de la folie, c’est un suicide collectif », avait-il constaté.

Le Pakistan est responsable de moins de 1 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre (pour 3 % de la population mondiale), mais il figure en 8e position des pays les plus menacés par les phénomènes météorologiques extrêmes, selon une étude de l’ONG Germanwatch. 

Par L'Obs avec AFP
Publié le 10 septembre 2022
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Tribune du Monde « Les données ne sont pas seulement personnelles : elles sont aussi un bien commun, qui peut résoudre beaucoup de problèmes

Les experts de la sécurité informatique Charles Cuvelliez et Francis Hayen observent, dans une tribune au « Monde », un changement de stratégie de la Commission européenne, désormais soucieuse de promouvoir l’usage des données plutôt que leur protection, tout en l’encadrant fortement.

Le règlement général sur la protection des données (RGPD) a donné des ailes à la Commission européenne. Après le RGPD, il y aura le Data Act ; la directive Open Data existe depuis 2019, le Data Governance Act, appliqué depuis juin (avec un délai de mise en conformité de 15 mois), et d’autres se préparent. Il y a là un risque de superposition de régulations qui se contredisent, ainsi que des autorités qui les superviseront. On peut craindre un manque de cohérence. Les Etats-Unis nous emboîtent le pas. Mais les nouvelles régulations européennes auxquelles le RGPD s’applique ont un autre but : atténuer, en quelque sorte, les effets du RGPD. Car les données ne sont pas seulement personnelles : elles sont aussi un bien commun qui peut résoudre beaucoup de problèmes.

Le Data Act concerne les données produites par nos appareils ou par les services qui les utilisent. Elles appartiennent à ceux qui les créent, les utilisateurs, et pas seulement aux constructeurs ! Ces derniers devront mettre les données à disposition par l’intermédiaire de l’appareil, et, quand ce n’est pas possible, les envoyer à qui de droit sur demande. En contrepartie, ces données ne pourront pas être utilisées pour mettre au point un produit concurrent. Le RGPD prévoyait un droit de portabilité de ses données personnelles. Mais, en pratique, le manque de formats interopérables ne permettait de les récupérer que pour soi. Ce droit est étendu par le Data Act aux données non personnelles et aux données des personnes morales, et prévoit qu’un utilisateur puisse confier ses données à un tiers. Mais les Big Tech sont maintenus en dehors de cette régulation. Les organismes publics peuvent bénéficier de ces données, à condition de le justifier (urgence publique, service public), mais pas pour des enquêtes de police ou administratives. Il est possible de s’y opposer, si les données sont non disponibles ou si la demande n’est pas conforme au Data Act.

Tiers de confiance

Le Data Act permet donc de changer de prestataire de traitement de données, par exemple sur le cloud. Mais les droits des usagers et les obligations des gestionnaires de cloud en matière de données doivent être spécifiés dans le contrat. La Commission pourra imposer des standards d’interopérabilité. Comme pour le RGPD, les fabricants doivent prévenir toute demande illégale d’autorités hors Union européenne d’accéder aux données, en dehors des cas prévus par les traités d’assistance judiciaire mutuelle. Le Data Governance Act, quant à lui, complète la directive Open Data, active depuis 2019. Celle-ci a déjà imposé le partage et le droit à la réutilisation des données produites par les organismes publics ou les sociétés privées, dans le cadre du service public qu’ils opèrent (par exemple dans le transport ou l’énergie). Il s’agit de données dites à grande valeur ajoutée sociétale, pour autant qu’elles proviennent de services non ouverts à la concurrence ou quand il s’agit d’un service d’intérêt général.

Le Data Governance Act va plus loin pour les données qui ne sont ni tout à fait publiques ni libres de droits, par exemple un contenu commercialement sensible, des données concernant la propriété intellectuelle ou certains types de données personnelles. On anonymisera les données, on recherchera le consentement des ayants droit, on fera attention à la propriété intellectuelle, bref, on contrôlera leur réutilisation, dit le Data Governance Act.

Le Data Governance Act propose la création de tiers de confiance pour l’échange de données entre tous les intervenants possibles – ceux qui les utilisent, ceux dont elles émanent, ceux qui les fabriquent, fonctionnant comme des coopératives (par opposition aux courtiers en données, qui font florès aux Etats-Unis). Tout comme dans le Data Act, tout doit être fait pour empêcher un accès non légal aux données concernées par le Data Governance Act depuis un pays tiers en conflit avec les lois locales ou européennes. Le pays doit offrir les mêmes garanties de protection.

Réguler l’intelligence artificielle

Après le RGPD, qui allait dans le sens de l’absence de partage des données personnelles, ces nouveaux règlements tendent à remettre le partage des données au centre de la régulation, mais en en excluant les Big Tech. Ces régulations en cascade admettent toutefois l’idée que, si l’on partage ses données, on en perd le contrôle parce qu’un tiers les reçoit, et elles sont donc très prescriptives pour encadrer ce partage. Mais il existe une autre approche : celle de données partagées in situ, qui restent sous le contrôle du propriétaire. 

Si l’on estime désormais que les données sont un bien commun, il leur faut avoir d’autres vertus que rien ne garantit encore : fiabilité, robustesse (elles doivent continuer à être utiles dans un environnement dégradé), auditables (on doit pouvoir les vérifier), non répudiables quand elles sont produites par un tiers. Seule la régulation sur l’intelligence artificielle commence à se préoccuper de ces questions, avec des inquiétudes sur la qualité des données utilisées pour l’entraînement des robots : leur précision, l’absence de biais, etc. Mais il reste un domaine où la régulation ne court aucun risque d’inflation réglementaire : celle qui cadre la surveillance étatique des données…

Tribune du monde du 16 septembre 2022.
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Des associations veulent interdire les écrans numériques publicitaires au nom de la sobriété

« Il est temps d’agir vraiment, Monsieur le Président : éteignez les écrans », exigent les signataires de la pétition lancée ce mardi par plusieurs collectifs et associations dont Résistance à l’agression publicitaire (RAP), Plein la vue, Alternatiba, Greenpeace et ANV-Cop21. Ces derniers réclament l’interdiction définitive des écrans de télévision publicitaires, jugés incohérents dans un contexte d’appels répétés à la sobriété et d’urgence climatique.

« Ils contribuent au gaspillage d’énergie et de ressources, sont néfastes pour la santé et la biodiversité, […] soumettent les citoyens à toujours plus de pression publicitaire, contribuent à la pollution lumineuse et servent essentiellement aux grandes entreprises, au détriment du commerce de proximité », fustige la pétition. D’après un rapport de l’Ademe (l’agence de la transition écologique) de 2020, un écran publicitaire de deux mètres carrés consomme 2 047 kilowattheures (kWh) par an, soit presque l’équivalent de la consommation annuelle moyenne d’un ménage (hors chauffage).

« On nous demande de couper notre wifi, d’arrêter d’envoyer des mails rigolos, et en même temps, on laisse des écrans super consommateurs d’énergies et de ressources », pointe auprès de Vert Thomas Bourgenot, chargé de plaidoyer pour le RAP. « En termes de sobriété, on veut juste pousser le gouvernement à faire des choses un peu plus utiles que ce qu’il propose pour le moment. » Il y a plusieurs semaines, le ministère de la Transition énergétique a prononcé l’extinction des publicités lumineuses la nuit, entre une heure et six heures du matin, partout en France. Jusqu’à présent, les règles différaient d’une ville à l’autre. 

Article rédigé par Justine Prados
Publié le 13 septembre 2022
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